Je vous présente ici un article sur la numérisation et la restauration numérique de très vielles photos sur plaques de verre au gélatino-bromure d’argent.

Introduction

Lorsque l’on trouve de très vielles photos (datant du début des années 1900) on est souvent ému par ce témoignage du passé et les premières préoccupations commencent à apparaître:

  • Comment conserver ces photos ?
  • Comment arrêter la détérioration dû au temps qui passe ?
  • Comment identifier les personnes et les lieux sur ces photos ?

Une des évidences est de numériser ces photos, cela permettra de figer ces images et d’être moins contraint par leur détérioration. Puis grâce à la puissance de certain outils nous allons pouvoir envisager leur restauration numérique, leur redonner une seconde vie. Enfin, une fois ces photos numérisées nous allons pouvoir les tirer sur papier ou les partager via internet ce qui nous aidera dans la tâche d’identification.

Cette tache d’identification est importante et de plus en plus difficile, une course contre la montre est réellement engagée. En effet, les personnes en mesure d’identifier des personnes sur des photos des années 1900-1940 se font malheureusement de plus en plus rares. Il faut donc pourvoir partager ces photos, soit via un site web soit avec des tirages photos issues de la numérisation.

Dans les années 1870-1935, une des techniques la plus répandues dans la photographie était la prise de vue sur des plaques de verres sèches au gelatino bromure d’argent. La taille des plaques les plus courantes étaient 13×18 cm ou 9×12 cm. Le temps de pose allait entre 1/25s et 1/60s, d’où certaines images avec un flou de bougé (surtout en présence d’enfants…). On obtenait une image en négatif noir et blanc directement sur le verre.

Boîtes de plaques de verre sèches au gélatino bromure d’argent

 

Nettoyage

Une première étape consiste à nettoyer ces plaques de verre. Opération très délicate.

Il faut impérativement manipuler ces plaques avec des gants en coton pour éviter de laisser ses empreintes sur le verre ou déposer de la sueur. Il faut faire cela dans un endroit propre et sec et surtout au calme pour éviter toute fausse manipulation qui pourrait endommager à jamais ces plaques.

Photo sur une plaque de verre sèche au gélatino bromure d’argent

Grâce à un pinceau à maquillage ou à un blaireau à poils doux, je vais enlever délicatement la poussière sur les 2 faces.

Pour la face sensible (légèrement argenté) je ne fait que ce nettoyage au pinceau, j’ai vraiment trop de détériorer le support. Pour le moment je m’interdit de mettre tout produit.
Par contre je nettoie l’autre face avec un chiffon légèrement humide. S’il y a vraiment des tâches grasses, on peut le faire avec un peu d’alcool.

Il faut bien laisser sécher, on positionnera un papier entre chaque plaques pour éviter qu’elles se rayent entre elles.

Numérisation

Pour la numérisation, je ne vais pas utiliser un scanner mais mon reflex numérique avec une table lumineuse.
En effet, le temps de numérisation est très rapide avec un reflex, et le fait d’avoir des images au format raw va me permettre d’améliorer les photos en post-traitement (luminosité, contraste,….) beaucoup plus facilement.

J’utilise un statif de reproduction Kaiser pour fixer l’appareil photo et une table lumineuse Kaiser (Slimlite Led).

Il y a 2 solutions pour poser la plaque sur la table lumineuse:

    • Face sensible sur la table lumineuse:
      • Avantage: La photo est numérisée dans le bon sens
      • Inconvénient: On perd un peu de détail (le grain de la photo), l’épaisseur du verre peur créer un léger flou (qui peut être un avantage pour gommer le grain…)
    • Face sensible face à l’appareil photo:
      • Avantage: L’objectif macro va pouvoir capter le moindre détail, même le grain de la photo. si le côté non sensible est très sale, c’est la méthode à privilégier
      • Inconvénient: la photo est à l’envers, il faut penser à la retourner en post-traitement.

Pour la mise au point soit j’utilise le collimateur central (qui est très sensible et précis sur le Canon 6D), soit je fais une mise au point manuelle sur l’écran (Liveview). Je me mets en priorité ouverture à f4. Je dois avoir une profondeur de champ légèrement supérieure à l’épaisseur du verre.

Installation de la table lumineuse et du statif de reproduction

Je surexpose en moyenne de ⅔ d’IL en veillant à ne pas cramer les blancs. A chaque prise il faut bien vérifier l’histogramme.
Je travaille en RAW pour pouvoir faire un post-traitement efficace par la suite.
Il me faut moins d’une minute par plaque pour la numériser (temps de manipulation compris !), avec un scanner ca serait beaucoup plus long. Ce qui me permet d’enchaîner assez rapidement cette étape.

Post-Traitement des RAW

J’ai maintenant sous forme de fichier RAW des photos de mes plaques de verres. Ce sont en fait des négatifs noir et blanc qu’il va falloir inverser en post-traitement et optimiser la luminosité et le contraste.

Je développe mes images RAW avec Darktable et le module “Docteur Néga”, et les principales étapes sont:

  • Rotation et recadrage de la photo.
  • Inversion avec le module “Docteur Néga”
  • Egaliseur de constraste
  • Egaliseur de ton
  • Contraste local

Certaines images avec des erreurs d’exposition à la prise de vue vont nécessiter plus de travail en post-traitement pour leur redonner un aspect correct. Mais franchement, de mon expérience, on arrive souvent à faire des petits miracles. J’ai le souvenir d’avoir eu des plaques complètement jaune et franchement cramées, probablement dû a des erreurs au moment du développement, et on retrouve un niveau de gris tout à fait acceptable.

Restauration numérique

Maintenant nous avons des images en niveaux de gris bien équilibrées. Si les plaques ont souffert du vieillissement, il peut y avoir des rayures, des tâches ou des “piqûres” plus ou moins grandes.

L’outil de retouche dans Darktable étant maintenant très puissant je n’utilise plus Gimp pour corriger ces défauts.
Parfois on peut essayer de reconstruire certaines parties manquantes, mais sans dénaturer l’image.

Chaque image étant différente il n’y a pas de règle précise ici. Avec l’expérience on arrive à aller plus vite. Mais il est clair que suivant le résultat espéré il va falloir passer parfois beaucoup de temps.

Conclusion

Les phases de numérisation et d’inversion des tons sont rapides avec cette méthode. Si on est exigeant sur la qualité et/ou en présence de supports abîmés, la tâche de restauration peut prendre beaucoup de temps. Il faut savoir se fixer des objectifs raisonnables.
Rien n’empêche de faire rapidement la numérisation de tout son stock de photo et de faire le post traitement plus tard. L’important est de ne plus être contraint par la possible détérioration des originaux.

Matériel et logiciels utilisés

  • Table lumineuse Kaiser Slimlite LED
  • Statif de reproduction Kaiser
  • Canon EOS 6D
  • Objectif Canon 100mm Macro f/2.8 USM IS L
  • Télécommande
  • Darktable
  • Gimp

Références

Livre: Guide de la photographie ancienne – 2ème édition – Thierry Dehan, Sandrine Sénéchal

Quelques exemples: